- DIÉTÉTIQUE
- DIÉTÉTIQUELa diététique hippocratique est «médecine par bonne hygiène de vie». Petit à petit, elle est devenue l’art, puis la science des régimes alimentaires.L’adjectif «diététique» qualifie ce qui est conforme aux données sur la prévention ou le traitement des maladies par les régimes rationnels.Ainsi, considérée dans son sens restrictif, la diététique est l’aspect rationnel de l’alimentation préventive et curative; entendue au sens large, elle inclut un art de vivre à partir des gestes élémentaires de la vie quotidienne.Origines hippocratiques de la diététiqueLes sens divers donnés à la diététique suivant les temps et les lieux permettent de dégager les caractères mêmes des sociétés. L’Encyclopædia Britannica définit la diététique comme l’application de la science de la nutrition à l’alimentation de l’homme sain et malade. L’encyclopédie de Maunders disait en 1848: «La diététique est la science ou la philosophie du régime.» La disparition en cent ans du mot «philosophie» marque la volonté de rationaliser les pratiques diététiques.Dans les pays latins, où le médecin n’est pas le physician , celui qui s’occupe de physis , mais celui qui «prend soin» (mederi en latin) de l’homme, «la seconde partie de la médecine est dite diététique, laquelle donne secours aux malades par bonne hygiène de vie» (A. Paré). «Or, la santé ne consiste qu’en un usage modéré de l’air que l’on respire, du boire et du manger, du mouvement et du repos, du sommeil et des veilles et des passions de l’âme, lequel usage s’appelle diète» (Le Régime de santé de l’école de Salerne , traduit par maître M. Le Long, Paris, 1649).C’est là le prolongement de la diététique hippocratique, médecine de tendance «psychosomatique», basée sur le principe que «les mœurs de l’âme suivent la température (ou tempérament) du corps». Ainsi, le terme «mélancolie» désigne à la fois une humeur peccante engendrée par un mauvais régime, un ensemble d’affections organiques et aussi l’extériorisation d’une conscience triste. On la combat par un régime alimentaire, une franche gaieté, qui échauffe l’être humain et dilate les canaux de la rate, en libérant l’humeur noire.Hippocrate ne dogmatisait rien. Il distinguait les aliments chauds des aliments froids, comme les Chinois ceux qui sont yin et ceux qui sont yang – aujourd’hui la science dirait: riches ou pauvres en protéines et calories. Mais, au long de l’histoire du monde latin, la sagesse hippocratique est restée dans l’ombre. La spécialisation de la médecine, la vogue de la pharmacologie, l’extrême complexité de la physiopathologie de la nutrition qui, seule, peut cependant justifier l’aspect rationnel des régimes, font que la diététique est moins répandue chez les médecins que chez les malades. Il est en effet de bon sens d’attribuer une série d’états chroniques à des erreurs de régime.Contenu actuel de la diététique thérapeutiqueL’empirisme et la fantaisie furent donc de règle jusqu’à l’avènement de la physiopathologie de la nutrition, intégration délicate de biochimie et de physiologie des systèmes et métabolismes généraux. La diététique étant l’application des secteurs de pointe de la biologie, elle en reste tributaire dans son développement.Par ailleurs, changer un régime alimentaire implique une transformation profonde du comportement, des motivations, des habitudes, c’est une véritable ascèse plus difficile à faire accepter qu’une pilule.Cependant, les maladies d’une société évoluent. Jusque dans les années quarante, la tuberculose, la rougeole, les épidémies constituaient encore les causes majeures de mortalité de l’enfant et surtout de l’adulte. Mais les vaccins, sérums et antibiotiques, ainsi que l’hygiène, ont fait reculer ces agresseurs. C’est dans le comportement humain lui-même que subsistent bien des causes des maladies.On donnera deux exemples typiques mettant en valeur la place de la diététique dans la médecine actuelle, face à la surconsommation de corps gras dans les sociétés industriellement développées.Problème de l’obésitéL’obésité est la conséquence d’un excès de recettes sur les dépenses et ne se réduit que par un bilan calorique négatif d’au moins 9 000 calories par 1 kg de graisse. Il y a deux façons de rendre au contraire positif un bilan calorique: manger plus que de coutume ou dépenser moins qu’il n’est habituel. Manger plus a toujours des motivations profondes: excès de la «convivialité», du plaisir à manger ensemble, à communiquer autour d’une table bien servie (ob-edere ); à l’opposé, recherche d’une tranquillisation orale solitaire devant l’anxiété de la vie. Dépenser moins met en jeu des régulations physiologiques très intégrées: réduction des masses actives à coût énergétique élevé; utilisation de combustibles à meilleur rendement (acides gras aux dépens du glucose); sensibilité plus grande de la peau au froid conduisant à une meilleure protection vestimentaire, surtout épargne des gestes et des contractions musculaires inutiles. Cette obésité constitutionnelle réalise dans les cas sévères une sorte d’hibernation physiologique et psychologique. Le régime des grandes cures d’amaigrissement doit être hypocalorique (de 600 à 1 500 calories), normal en protéines (50 à 60 g par 24 heures) car l’obèse ne doit pas maigrir au détriment de sa masse cellulaire active, devenant ainsi un «dénutri floride», fatigable et déprimé. Son régime doit être aussi pauvre que possible en glucides, curieux stimulants de la faim. Enfin, les aliments doivent être pris régulièrement en trois repas par jour. Sauter un repas, jeûner accroît le rendement des aliments dès que l’on mange à nouveau.Voici un exemple de régime hypocalorique d’amaigrissement. Petit déjeuner : thé ou café sans sucre, lait entier ou écrémé (200 à 300 ml), 150 g de fruits (sauf banane et fruits secs); déjeuner : viande ou poisson maigre (100 à 150 g), légumes verts (300 g, avec une cuillère à café de beurre ou d’huile), fromage (20 à 25 g); dîner : comme au déjeuner, 2 œufs remplaçant 120 g de viande ou 80 g de fromage à pâte ferme. Au cours d’un tel régime, il convient de ne boire que de l’eau.Problèmes de l’hypercholestérolémie et de l’athérosclérose artérielleLes facteurs que l’on peut considérer comme impliqués dans ces maladies dégénératives du cœur et des vaisseaux ont été groupés dans le schéma de la page précédente: il n’est donc pas question d’établir des relations de cause à effet simples entre le régime et la maladie. Cependant, on peut dire qu’il s’agit là de maladies souvent liées au «trop manger»; que manger des graisses, manger du sucre sont deux moyens courants de trop manger; qu’apportant des calories sans vitamines, sucres et graisses déséquilibrent finalement la ration. Le maintien d’une grande activité physique, la vie en climat froid rendent toutefois l’hyperphagie moins dangereuse.Par ailleurs, le régime habituellement pratiqué pour diminuer une hypercholestérolémie comporte la suppression aussi complète que possible des graisses (supprimer les graisses habituellement ajoutées à la cuisine, les remplacer par 2 ou 3 cuillerées à soupe d’huile de maïs ou de tournesol, éliminer les fromages, le lait ordinaire, la charcuterie, la pâtisserie, les viandes grasses). Un tel régime, bien fait, s’accompagne souvent d’une diminution de la cholestérolémie. Les médecins insistent aussi sur des formes d’hypercholestérolémie dépendant des glucides.Le domaine de la diététique médicaleApplications thérapeutiquesLa dénutrition, le diabète, les cirrhoses, les lithiases urinaires et biliaires, la goutte, les insuffisances digestives, cardiaques, rénales, hépatiques impliquent une diététique appropriée. On évoquera seulement comment la diététique peut s’insérer dans la physiopathologie puis dans la thérapeutique.Il va de soi que transformer les habitudes alimentaires d’un malade demande du temps et une compréhension humaine profonde. L’efficacité d’un régime tient probablement autant au changement de mode de vie qu’il implique qu’à ses effets proprement physiologiques.Le récit que fait le malade de ses repas, les attitudes quotidiennes devant les aliments sont un fil d’Ariane pour mettre au jour les affects les plus intimes. Prescrire un régime est une psychothérapie active, impliquant une connaissance approfondie du comportement alimentaire de l’homme. Si on mange trop et trop gras, c’est en rapport avec le surmenage dû à la vie moderne. Si on avale goulûment pendant les repas, c’est qu’on a besoin de ce mode primitif de tranquillisation. La diététique donne ainsi tout leur sens aux gestes inconscients de notre vie quotidienne.Aliments diététiquesLes aliments diététiques sont définis en France par le décret du 25 mars 1966 comme tout produit alimentaire non médicamenteux possédant des propriétés particulières concernant la santé humaine, ou convenant à la pratique de certains régimes, ou à l’alimentation infantile. Ce produit doit posséder effectivement ces propriétés et se différencier nettement des aliments habituels, soit en raison de sa composition, soit en raison de sa préparation spéciale. En vérité, il s’agit là de la légalisation d’une situation de fait d’aliments vendus comme diététiques, plus que de l’expression d’une réalité foncière. Il est normal qu’un homme bien informé cherche à abaisser sa cholestérolémie en remplaçant les graisses usuelles par une huile de tournesol, qu’un constipé atonique veuille du vrai pain complet, qu’un gastritique recherche un vin pauvre en acides organiques, qu’un obèse recherche une viande de cheval peu grasse, sans pour cela que ces aliments soient «diététiques».Diététique hospitalièreL’alimentation du malade à l’hôpital est en général appelée «diététique hospitalière». Dans certains hôpitaux il ne s’agit que d’un système hôtelier d’un type particulier avec des régimes sans sel, pauvres en graisses, pauvres en fibres, hyperprotéiques, liquides, etc. Dans d’autres, il existe des services spécialisés pour les maladies dont la diététique est le traitement majeur. Enfin, la formule du groupe de diététique comportant un médecin à côté des diététiciennes, rattaché soit à un service spécialisé, soit à un centre de recherches, paraît la plus adéquate actuellement. Elle intègre la diététique dans l’ensemble des soins.• 1549; lat. diæteticus, gr. diaithêtikos1 ♦ Relatif à un régime alimentaire, surtout restrictif (⇒ 1. diète). Aliment diététique, que sa composition ou sa préparation différencie des autres aliments. — Subst. fém. Rayon de diététique d'une pharmacie.2 ♦ N. f. Ensemble des règles à suivre pour équilibrer l'alimentation (ration calorique, apport d'éléments indispensables) et l'adapter aux besoins individuels.♢ Méd. Ensemble des principes et des méthodes de réalisation des régimes alimentaires conçus pour les malades.diététiquen. f. et adj.d1./d n. f. Branche de l'hygiène qui traite de l'alimentation.d2./d adj. Relatif à l'alimentation.|| Cour. Se dit d'une alimentation saine, équilibrée, pauvre en calories. Un menu diététique.⇒DIÉTÉTIQUE, adj. et subst.I.— Adj., MÉD. Relatif à un régime alimentaire propre à conserver ou à rétablir une bonne santé. Préceptes, produits, règles diététiques. Régime diététique (FRANCE, Bergeret, 1901, p. 338) :• 1. Sigognac fit signe qu'il ne voulait que de l'eau. « Condamnable régime, dit le Pédant, grave erreur diététique; l'eau ne convient qu'aux grenouilles, poissons et sarcelles, nullement aux humains; en bonne pharmacie, on devrait écrire sur les carafes : « remède pour usage externe. (...) »GAUTIER, Le Capitaine Fracasse, 1863, p. 267.— P. métaph. Mais la malice, la virtuosité de M. Sacha Guitry consistent à mettre ses créatures au régime, élégamment diététique, de la rupture à mi-voix, de la larme retenue, de la plaidoirie amorcée et du dénouement évasif (COLETTE, Jumelle, 1938, p. 8).II.— Subst. fém. Ensemble des règles d'hygiène alimentaire fondées sur l'étude du pouvoir calorifique et de la valeur nutritive des aliments, permettant d'établir le régime alimentaire approprié à chacun. Une bonne diététique, une diététique sévère. Un manuel de diététique (FARAL, Vie temps St Louis, 1942, p. 189) :• 2. ... le perfectionnement des pratiques particulières dans les arts manuels, et celui de la diététique et de la morale, contribuent davantage au bonheur des individus.CABANIS, Rapports du physique et du moral de l'homme, t. 1, 1808, p. 5.— Au fig. Il y a une diététique de l'esprit, et une hygiène de l'âme (AMIEL, Journal, 1866, p. 138).Prononc. et Orth. :[djetetik]. Ds Ac. 1762-1932. Étymol. et Hist. 1. 1549 adj. méd. diaetetique (TAGAULT, Chir., p. 92, éd. de 1645 d'apr. DELB. Notes ds HUG.); 2. 1575 subst. dietetique (A. PARÉ, Œuvres, préf., éd. J. F. Malgaigne, t. 1, p. 23). Empr. au lat. impérial diaeteticus adj. « diététique » et diaetetica subst. « id. » empr. au gr.
adj. et
subst. « id. ». Fréq. abs. littér. :26.
diététique [djetetik] adj. et n. f.ÉTYM. 1549; du lat. diæteticus, grec diaithêtikos, de daitan « soumettre à un régime », de diaita. → 1. Diète.❖1 Adj. Relatif à un régime alimentaire, surtout restrictif. ⇒ Diète. || Aliment diététique. || Facteurs diététiques et facteurs hygiéniques.2 N. f. (1575, lat. diætetica, grec diaithêtike, subst. fém. de l'adj.). Ensemble des règles à suivre pour une alimentation bien équilibrée (rations alimentaires, apport calorique).♦ Méd. Ensemble des principes et des méthodes de réalisation des régimes alimentaires conçus pour les malades.❖DÉR. Diététicien, diététiste.
Encyclopédie Universelle. 2012.